Un coup d’oeil sur « Le crépuscule des absolus », un roman de Tiguy Elebe Montigiya.

Culture
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La sortie officielle, en deux séquences, du roman ci-dessus mis en vedette a suscité un enthousiasme particulier dans le milieu littéraire congolais. Et aussitôt après son lancement sur les différentes plateformes spécialisées le 1er août 2025, ainsi que son vernissage au Pullman Hôtel de Kinshasa le 4 septembre écoulé, un besoin d’en savoir un peu plus sur cet auteur et son œuvre s’était rapidement imposé dans le chef de nombreux amoureux des belles-lettres.

Il est vrai que la posture littéraire de Tiguy Elebe Montigiya a toujours intrigué plus d’un curieux, tellement son leadership avenant et avéré dans le monde de la littérature congolaise leur paraît un tantinet axiomatique.
En effet, hormis le « Cancer de Carine. Témoignage posthume », un essai de développement personnel sorti chez Harmattan RDC en juin 2015, on ne connaissait de lui que le récit de quelques excentricités palpitantes de « Mavioka et Mavuela », dont les extraits sont d’une manière subtile régulièrement publiés sur son compte Facebook.

Il faudra cependant reconnaître que beaucoup de gens sont séduits par sa grande prestance « d’influenceur littéraire », qui a amené d’aucuns à le qualifier de « Bernard Pivot congolais ». En tout cas, à travers ses publications multiformes, via ses multiples comptes sur les réseaux sociaux, Tiguy Elebe Montigiya indique à ses milliers d’abonnés la direction à prendre pour persister dans leur amour pour les livres.

Voilà que tout d’un coup, un peu sur les traces de son père, le grand écrivain congolais Philippe Elebe Ma Ekonzo, contemporain de Valentin Yves Mundimbe (ou Vomba Yoka Mundimbe), Mukala Kadima Nzuzi, Phillipe Masegabio Nzanzu, Elisabeth Mweya Tol’ande, François Médard Mayengo Kulonda, Gaby Sumaili, et autres Zamenga Batukezenga, l’initiateur de la plateforme littéraire « Les Plumes Conscientes » nous fait gaver l’esprit avec le « Crépuscule des absolus », en nous amenant à nous rappeler de « Le crépuscule des idoles », du célèbre philosophe et critique culturel allemand Friedrich Nietzsche, pourquoi pas de « Le crépuscule des fauves », ce roman aux allures d’un épisode de « Mission Impossible », signé Marc Levy.
Avec la publication de son œuvre romanesque ébahissante, Tiguy Elebe Montigiya a su prouver, avec une réelle maestria, qu’à l’instar de ses frères et sœur, la littérature se retrouve incrustée dans l’ADN de la fratrie Elebe.

Dans ce roman époustouflant, Tiguy Elebe narre avec dérision et perspicacité la situation politique de la République du Kundinga, un lieu imaginaire où s’enchevêtrent des contradictions politiques, qui se muent souvent en contrariétés politiciennes, la démocratie y étant devenue la démocrature, comme dans tant d’autres pays du berceau de l’humanité. Grâce à son écriture chatoyante, un peu trop encline au suspense, avec au menu un recours altier aux ellipses et aux syllepses, l’auteur de « Le Crépuscule des absolus » entraîne son lecteur au cœur des intrigues absolument mirifiques, qui commencent par un coup de force orchestré par un certain colonel Malonda, décidé à délivrer le pays de la destinée glorieuse des malices du vieux dictateur Yelutadio.

Malheureusement pour ce brave soldat du peuple, il avait été zigouillé juste au moment où il faisait sa déclaration de prise de pouvoir à la Radio Télévision Nationale Kundingaise, RTNK en sigle, par un caméraman membre de services secrets, qui avait fait recours à un pistolet camouflé dans son matos.

Finalement, coincé entre le zist et le zest, le dictateur sanguinaire à la solde des impérialistes va se retrouver six mois après dans la contrainte d’organiser des élections libres et transparentes. Et quoique malade et aboulique, Yelutadio se mettra aux prises avec Limbezi, un jeune turc à l’idéal angélique, qui a identifié le « Responsabilisme » comme une doctrine-panacée devant sauver le monde de l’incurie capitaliste, en faisant fi de la social-démocratie.

Photo souvenir de l’auteur du roman « Le Crépuscule des absolus  » ( en veste bleue nuit entre Mme Sylvie TSHIBASSU, la dame en pagne rouge écarlate et la conjointe de l’auteur (en complet violet et bleu) avec ses pairs de la corporation ecrivaine. On reconnaît juste après la poétesse Yolande Elebe Ma Ndembo ( en complet pagne rouge), l’actuelle ministre de la culture, patrimoine et arts, le poète Jean-Paul Brigode ILOPI Bokanga, (en chapeau Muniere) le directeur de rédaction de Média Actualité.

Outre ce prodige politique encensé par une grande partie de son peuple, de différents autres challengers, taupes du pouvoir en place, ou chevaux de Troie des puissances étrangères, entendent eux aussi avoir droit au chapitre, via un processus électoral que d’aucuns trouvent d’avance biaisé, en dépit du fait qu’il soit dirigé par un éminent prélat catholique. Les trahisons, la corruption, les détournements de deniers publics, les luttes d’influence, les abus sexuels, les coups de Jarnac, les rébellions, les défections, les ralliements opportunistes, bref, toutes ces vilenies et avanies qui affectent la bonne gouvernance et l’état de droit, et entachent d’une manière profonde la manifestation de la démocratie en Afrique, sont mises à nu dans ce roman déroutant et croustillant.

La phratrie Elebe, qui compte déjà 4 écrivains confirmés, (Tony Elebe Ma Ekonzo, en veste sombre à droite, Nick Elebe, Tiguy Elebe Montigiya, en veste sombre au milieu, entre sa sœur, la poétesse Yolande Elebe Ma Ndembo, en pagne rouge, l’actuelle ministre de la culture, patrimoine et art de la RDC, à gauche et son épouse à droite), entourant la star littéraire du moment.

Entre Yelutadio, Limbenzi, Mukeni, et Charles Ngoma, pour ne citer que ces grosses pointures de la vie politique kundingaise, qui ont chacune pu fédérer autour d’elles une frange importante de cette population crédule aimant souvent faire elle-même le lit de ses prédateurs, qui aura les faveurs du scrutin présidentiel organisé par l’implacable Abbé Engalisa, accusé à tort et à raison de rouler pour le pouvoir en place ?

Et qui du général Bruno Nzapali, qui voudrait, à partir de la République voisine de Mbekele, chasser du pouvoir ce vieux singe de Yelutadio, qui avait déjà perdu la queue dans la bataille, mais qui savait encore faire des grimaces, ou de Muntompwela, un ancien fidèle compagnon de lutte de Limbenzi, qui a préféré tourner casaque, pour au finish se retrouver en exil au pays de l’Oncle Sam, en vue de faire un plaidoyer en faveur d’un pouvoir qu’il avait toute sa vie combattu, va prendre le dessus ? En tout cas, ce n’est qu’en s’appropriant le plus vite possible l’emballant roman de Tiguy, qu’on pourrait s’affranchir de ce questionnement.

Ainsi, lire le roman de celui qui recommande à ses congénères de faire de la lecture leur préoccupation majeure est une vraie partie de plaisir et de découverte de multiples manipulations courantes, voire récurrentes, pourquoi pas des secrets d’alcôve, qui ont souvent cours dans la sphère politique de cette République du Kundinga, qui ressemble un peu trop à la mienne, peut-être aussi à la tienne !

Jean-Paul ILOPI Bokanga/Directeur de rédaction.

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